Le laboratoire ARTEHIS a la très grande tristesse de vous annoncer la disparition brutale et rapide de Jean-Paul Guillaumet.
La communauté scientifique vient de perdre un éminent archéologue qui, entre mille projets, a énormément œuvré pour la structuration et le développement de l’archéologie de notre région. Tous les membres de notre UMR, dont Jean-Paul était membre depuis sa création en 1993, ont profité de son activité insatiable durant ces quarante dernières années.
Bibracte vient de fêter, l’an dernier et avec lui, ses quarante années d’existence. Ce vendredi 13 juin 2025, au moment où se déroulera sa cérémonie funèbre, sera inauguré l’agrandissement de son musée. C’est un peu un symbole, tant le nom de Jean-Paul Guillaumet est, indéfectiblement, attaché à ce site majeur et à son pôle de recherche européen.
Si l’attachement de Jean-Paul avec Bibracte remonte à son installation à Autun dans les années 1970, animateur du réseau associatif Rempart puis conservateur adjoint du musée Rollin, c’est dans son élaboration de cet ambitieux projet qu’il a pu révéler ses capacités hors du commun d’organisateur et de facilitateur. Propulsée par le grand projet présidentiel initié en 1985, son action marque encore les équipes de chercheurs européens comme le territoire du Morvan Autunois. Profitant de ses réseaux français et d’Europe centrale, il a fait de Bibracte un lieu de rencontre bourdonnant unique en son genre. Un monde à son image, fait d’une tourmente d’échanges formels et informels, de connexions humaines, de foisonnement d’idées, d’entraides et d’éclats lumineux.
Car Jean-Paul Guillaumet était un bâtisseur. Non pas un bétonneur, mais un architecte doublé d’un ingénieur, qui savait tisser du lien, transformer en alliés des édiles locaux d’abord dubitatifs, convaincre les décideurs comme les hautes instances. Ce don ne l’a jamais abandonné.
À partir de 1994, l’institution Bibracte a suivi son brillant destin, piloté par d’autres dans le sillon tracé. Jean-Paul n’a pourtant pas quitté le bateau, poursuivant activement, quotidiennement, son action sur le site, par l’exploitation des données mobilières et, surtout, de ses immenses archives. Son entrée dans notre UMR a été l’occasion de mettre sur pied des programmes de fouilles internationaux, dans la « Come Chaudron » qu’il aimait tant, y accueillant une foule de collègues et d’étudiants.
Car Jean-Paul était aussi un passeur, un pédagogue hétérodoxe, dont la trace est imprimée à jamais dans le cœur et l’âme de ses collaborateurs. Ce ne fut jamais un maître. Il privilégiait la mise en application, la collaboration, la participation à l’action à la docte leçon : il goûtait peu l’académisme et les feux de la rampe. Ce fut avant tout un compagnon de recherche, mêlant action scientifique et convivialité humaine, dans un mélange unique dont nous ne retrouverons jamais le goût. Nombre de membres de notre UMR, mais aussi des autres laboratoires français et étrangers ont été ses élèves. Nous devrions plutôt dire que nous avons eu la chance de nous former à son contact, tant sa force conviviale et ses conseils bonhommes pouvait nous pousser à l’excellence. Ses « petits », devenus ses « camarades » peuplent aujourd’hui les institutions archéologiques, universités, CNRS, opérateurs d’archéologie préventive, collectivités locales, sans oublier l’EPCC Bibracte.
Membre de l’UMR créée en 1993 sous le nom Archéologie de la Bourgogne : le premier millénaire avant J.-C., il devient directeur de recherche en 2007. Son activité s’est diffusée dans de multiples directions, pas seulement en France. La liste de ses travaux, au cours de ses 42 années de présence à ARTEHISs, ne peut être dressée ni résumée à quelques exemples. Nous retiendrons que Jean-Paul savait s’investir, se sacrifier pourrait-on dire, pour la collectivité scientifique. Il l’a bien prouvé lors de sa prise de direction de notre laboratoire ARTEHI1 en 2012, pour une période réduite par son départ en retraite. Impliqué dans les axes du nouveau contrat (2024-2028) Fabrique du paysage et Matériaux, techniques et culture matérielle, il était très fidèle et présent aux réunions réunissant notre communauté. Nous n’oublions pas qu’il a contribué à créer une nouvelle façon d’appréhender les savoir-faire anciens à partir des mobiliers métalliques, cette étude des « paléomanufactures » que notre équipe tente de perpétuer.
Depuis sa retraite, il n’était pas resté inactif, apurant tous les dossiers laissés en suspens jusque-là. Nous devons constater, avec une grande tristesse rétrospective, que le volume de Scripta minora intitulé « Jean-Paul Guillaumet. L’Etude du métal », mis en ligne en 2024 (https://books.openedition.org/artehis/31728?lang=fr) et publié par ARTEHISEditions constitue en quelque sorte son testament de chercheur. On y retrouve, sous sa plume, un retour lucide sur sa carrière et son parcours, faits de multiples voies, souvent royales, parfois sans issues.
Sa marque, visible partout dans notre laboratoire, à Bibracte, à Autun et dans nombre d’autres lieu, n’est pas destinée à s’éteindre. Elle rayonne encore dans le cœur et dans l’esprits de ses collaborateurs, accueillis si régulièrement dans son antre de Glux-en-Glenne, « chez Antoine du Soldat », institution scientifique internationale en quelque sorte succursale de notre UMR.
Nos plus sincères condoléances vont à Myriam, à ses deux filles et à sa famille, ainsi qu’aux multiples collègues et amis qui ont pu le côtoyer.